Tai chi : balises pour un développement soutenable
Épuisement généralisé
Nous assistons à un épuisement simultané de la terre et des individus. Habitués au cloisonnement, nombre de nos contemporains sont étonnés lorsque l’on évoque ce rapprochement. Le tai chi chuan nous permet en fait de nous reconnecter à notre corps et à notre environnement et de percevoir leur interdépendance. Une pratique régulière nous ouvre des pistes pour prendre soin de nous et du monde et oeuvrer à un développement soutenable.
Changer de paradigmes
Notre monde vit une profonde mutation. Tous les domaines sont concernés : des techniques à l’habitat en passant par les énergies. L’éducation représente l’un des plus grands défis. Celle-ci, afin de retrouver une dimension humaine, devrait à mon avis revaloriser les savoir-faire, l’imagination et le corps. Des plongées inspirantes dans diverses pratiques traditionnelles peuvent nous aider à utiliser avec davantage de sagesse les immenses possibilités des nouvelles technologies.
Face à l’amplification des crises en tout genre – économiques, sociales, écologiques – il est grand temps de changer non seulement de logiciel mais aussi de carte mère, c’est-à-dire de modes de vie et de paradigmes de référence. Diverses recherches ont souligné l’extrême importance du mode de vie dans le maintien et l’amélioration de la santé. Ces mêmes recherches ont montré que les body-mind techniques sont les outils les plus appropriés pour transformer en profondeur les comportements et modes de vie.
Écologie corporelle
Le tai chi chuan utilise la lenteur pour développer l’écoute, la perception, la conscience. Tous les gestes sont effectués dans le respect des limites corporelles. Le travail avec partenaire constitue une véritable éducation à l’empathie. Le contact s’effectue en douceur, sans heurts. Le pratiquant accueille son partenaire avec bienveillance. Il accorde ses gestes à ceux de l’autre. Cette écoute et cette compréhension s’étendent à l’environnement. Le tai chi chuan apprend à réguler les énergies, à les économiser, à les recycler, à les transformer. Cette écologie corporelle est le fondement de l’adoption de modes de vie plus respectueux de la planète, notre terre mère.
Le taoïsme, à l’instar de nombre de pratiques traditionnelles, considère que la nature est vivante. Il est fondé sur l’idée de correspondances. L’une des analogies les plus caractéristiques est celle du microcosme-macrocosme. L’être humain et le monde possèdent des structures et des modes de fonctionnement similaires. En comprenant l’un, on comprend l’autre. Les pratiques proposées visent à une mise en dialogue de ces deux entités. Lorsque je pratique du tai chi chuan, j’engendre davantage d’harmonie dans mon corps mais aussi dans mon environnement.
Transformer notre quotidien
Dans un Far West globalisé, on a extrait plus de métaux en une génération que pendant toute l’histoire de l’humanité ; les burn out se développent de manière exponentielle. Tandis que les terres cultivables diminuent, les emplois vides de sens se multiplient. Nous prélevons des ressources non renouvelables à un rythme insoutenable ; des hordes d’écrans phagocytent l’attention des humains de tout âge.
Des pratiques telles que le tai chi chuan permettent non seulement de prendre conscience mais aussi de trouver le courage de répondre à ces défis contemporains.
En réactivant nos possibilités d’apprentissage intégral – par corps, par coeur et par intuition – compris comme mode de connaissance élargi, le tai chi chuan nous donne les moyens de transformer notre quotidien.
Édito revu Espace Taiji n° 107
Crédit photo : world’n pix