Éloge du carburateur - Essai sur le sens et la valeur du travail

Éloge du carburateur - Essai sur le sens et la valeur du travail

Présentation

Tout comme le consommateur idéal, le consultant en gestion projette une image de liberté triomphante au regard de laquelle les métiers manuels passent volontiers pour misérables et étriqués. Mêlant anecdotes, récit, et réflexions philosophiques et sociologiques, Matthew B. Crawford montre que ce « travail intellectuel », dont on nous rebat les oreilles, se révèle pauvre et déresponsabilisant. À l’inverse, il restitue l’expérience de ceux qui, comme lui, s’emploient à fabriquer ou réparer des objets – dans un monde où l’on ne sait plus qu’acheter, jeter et remplacer. Le travail manuel peut même se révéler beaucoup plus captivant d’un point de vue intellectuel que tous les nouveaux emplois de l’« économie du savoir ».

Extraits

La disparition des outils de notre horizon éducatif est le premier pas sur la voie de l’ignorance totale du monde d’artefacts que nous habitons (…)

L’enseignant réaliste vous expliquera qu’il est irresponsable de préparer les jeunes aux professions artisanales et manuelles, qui incarnent désormais un stade révolu de l’activité économique. On peut toutefois se demander si ces considérations sont aussi réalistes qu’elles le prétendent, et si elles ne sont pas au contraire le produit d’une certaine forme d’irréalisme qui oriente systématiquement les jeunes vers les métiers les plus fantomatiques (…)

Mais ce nouveau goût pour l’autonomie semble bien avoir émergé avant le début de la crise, et la tendance à la frugalité n’est peut-être qu’une justification économique superficielle d’un mouvement qui répond en fait à un besoin plus profond : le désir de rendre notre univers intelligible afin de pouvoir nous en sentir responsables (…)

« À l’école, nous créons un environnement artificiel pour nos enfants et ceux-ci sont bien conscients de tout ce qu’il a de forcé et de peu stimulant. Quand on n’a pas l’occasion d’apprendre avec ses propres mains, le monde reste quelque chose d’abstrait et de lointain, et la passion d’apprendre n’est pas mobilisée. » (…)

On sait que la satisfaction qu’un individu éprouve à manifester concrètement sa propre réalité dans le monde par le biais du travail manuel tend à produire chez cet individu une certaine tranquillité et une certaine sérénité. Elle semble le libérer de la nécessité de fournir une série de gloses bavardes sur sa propre identité pour affirmer sa valeur (…)

Le savoir-faire artisanal suppose qu’on apprenne à faire une chose vraiment bien, alors que l’idéal de la nouvelle économie repose sur l’aptitude à apprendre constamment des choses nouvelles : ce qui est célébré, ce sont les potentialités plutôt que les réalisations concrètes. D’une certaine façon, dans l’entreprise d’avant-garde, chaque salarié est censé se comporter comme un « intrapreneur » et s’impliquer activement dans la redéfinition incessante du contenu de son travail (…)

« Nos éloges du travail manuel renvoient le plus souvent aux valeurs qu’il est censé incarner et non pas à l’effort de pensée qu’il requiert. Il s’agit là d’une omission subtile mais systématique (…)

L’objectif de cet ouvrage est de mettre en lumière le potentiel d’épanouissement humain offert par les métiers manuels – la richesse de leurs défis cognitifs et les satisfactions psychiques qu’ils nous offrent.

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